Un certain R. Gary
Par un concours de circonstance incongru, François-Henri Désérable se retrouve devant le 16 de la rue Grande-Pohulanka à Wilno où a vécu dans ses jeunes années le romancier Romain Gary. Se souvenant d'une phrase de "La Promesse de l'aube", l'auteur part sur les traces de Monsieur Piekielny, la petite souris grise, mais aussi peut-être sur celles de Gary lui-même.
Avec une plume délicieusement drôle qui n'est pas sans rappeler celle de Gary, François-Henri Désérable, sous prétexte de nous parler de Piekielny, développe ici son rapport à la littérature. Fiction, autofiction, réalité déguisée? La frontière est floue pour l'écrivain mis en scène. En nous parlant de lui, il parle sans doute de Gary, deux hommes liés par le goût de l'embellissement. on pourrait alors parodier Dumas: "on peut tromper la réalité à condition de lui faire de beaux enfants".
Un récit court mais touchant qui vous donnera sans aucun doute l'envie de (re)découvrir l'œuvre de Romain Gary ou d'Emile Ajar, c'est au choix!
That damned elusive Pimpernel!
Eloïse est une historienne américaine, spécialiste du Mouron Rouge, ce héros anglais qui sauvait les aristocrates français de la guillotine. S'appuyant sur un journal inédit, elle est à deux doigts de découvrir la vérité sur l'identité de l'Œillet rose, compagnon d'armes de la Gentiane Pourpre.
Si tout le monde connaît les Trois mousquetaires et les aventures de D'Artagnan, on a un peu oublié celles du Mouron rouge de la baronne Orczy. Normal peut-être puisque nous autres français, y sommes les méchants. Lauren Willig, amoureuse de ces histoires de cape et d'épée et de ces hommes à l'identité mystérieuse, super-héros avant la lettre, a décidé de faire revivre les récits de la baronne Orczy dans sa série "L'Œillet rose". Lui ajoutant de nouveaux membres comme la Gentiane Pourpre ou le secret Œillet rose, les aventures extraordinaires de cette ligue se poursuit sous le Consulat et l'Empire de Napoléon Bonaparte.
Mélangeant passé et présent "La mystérieuse histoire de l'Œillet Rose" a tout d'un grand roman d'aventure: adrénaline, complots, trahison, sauvetage et histoires d'amour sur fond de post-Révolution française. Pour les amoureux du genre.
Dans les années 50 dans le quartier pauvre de Poplar à Londres la jeune sage-femme Jennifer Lee rejoint les sœurs-sage-femmes de Nonnatus House pour apprendre son métier.
Récit de cet apprentissage, "Appelez la sage-femme" est le récit des changements sociaux dans l'Angleterre d'après-guerre. Nurse Lee, comme on l'appelle, découvre, aux côtés de ces religieuses pas comme les autres, la complexité de la vie dans les Docks de l'East-end. De la pauvreté crasse et imbécile aux histoires les plus lumineuses, le récit de Jennifer Lee est à la fois un précieux document historique et un texte humain bouleversant.
Mêlant à la fois, souvenirs, précisions médicales et témoignages des changements de la société anglaise, notamment à l'arrivée de la contraception, "Appelez la sage femme" est tour à tour drôle, tragique et brillant.
Ne tirez pas sur l'émeu moqueur
Liz et Bean Holladay n'ont pas une vie facile. Leur mère, chanteuse et actrice en devenir, femme fantasque qui maîtrise mal ses émotions, disparaît fréquemment, le temps de se ressourcer. Lorsqu'elle disparaît un peu plus longtemps que d'habitude, les deux sœurs décident de partir chez leur oncle Tinsley en Virginie pour échapper aux services sociaux. Renouant avec leur passé Liz et Bean vont découvrir une nouvelle stabilité, jusqu'au jour où, pour se faire de l'argent de poche, elles entrent au service de Jerry Maddox, un homme controversé et pernicieux.
Il y a indéniablement un goût d'Harper Lee chez Jeannette Walls. Dans la pure tradition des grands romans du sud des Etats-Unis, l'histoire de Liz et Bean Holladay traite tout à la fois d'une famille désunie et instable, du poids de la société dans une petite ville des années 70, de l'intégration raciale ou encore du sexisme chevillé au corps de la vie américaine.
Dans une langue vivante qu'elle emprunte à Bean, son héroïne téméraire et forte tête qui n'est pas sans rappeler Scout de "Ne tirez pas sur l'oiseau moqueur", "L'étoile d'argent" est une très belle leçon de courage et d'amour.
Dans un besoin de retour aux sources, Isabelle Spaak rebrousse chemin sur les traces de sa grand-mère Mathilde et de sa mère Annie. Retrouvant les demeures d'enfance, les courriers, les photos et autres objets leur ayant appartenu, Isabelle Spaak renoue avec les vies de ces femmes fantasques à la réputation sulfureuse.
Délicatesse et finesse peuvent tout à faire caractériser cette enquête qui ne manque pas de romanesque. Avec beaucoup de pudeur mais aussi pas mal de réalisme, Isabelle Spaak porte un éclairage à la fois tendre et sévère sur les deux femmes de sa vie. De révélations en prises de conscience, le récit fait basculer la vie de la narratrice à mesure qu'elle reconstitue celles de ses parentes.
Un très beau texte, une double biographie passionnante qui se lit d'une traite.