Habemus Bastard - Tome 1 - L être nécessaire
1
De Jacky Schwartzmann
Illustrations de Sylvain Vallée
Dargaud
policier
J'ai adoré le graphisme magnifique de l'album : la couverture noire, la vue sur la ville en arrivant par le train, les doubles pages de paysages.
J'ai été moins fan de l'histoire avec laquelle j'ai eu un peu de mal.
Espérons que je comprenne mieux avec le second tome.
J'ai aimé l'humour : que se passe-t-il le dimanche ?
Et j'ai eu de la peine pour la petite fille qui fait ses devoirs au café.
Monet
J’ai aimé cette nouvelle enquête, cette fois-ci sur un chef d’œuvre de la peinture : les Nymphéas de Claude Monet, excusez du peu.
J’ai retrouvé avec plaisir la Bmore & Investigation, même si Penny est moins présente.
J’ai aimé les différentes hypothèses du détective : les Grands Panneaux, ce sont les millions de morts de la Première Guerre Mondiale (p.49) ; ce sont les 9 millions de morts + celle de son fils.
Du temps de Monet, les nymphéas inspiraient méfiance et effroi, fleurs naissant dans la vase et dont l’une des propriété médicale est semblable au bromure.
J’ai adoré que le narrateur s’aide du dernier James Bond (p.153), du professeur Tournesol et de sa véritable identité (p.230), Edgar Poe dont Monet était un grand lecteur (p.303), des œuvres du peintre Hodler (p.352), du film Blow-up (un peu partout dans le texte), de l’Écume des jours de Boris Vian (p.404).
J’ai aimé son humour, répétant à l’envie de les nazis n’ont jamais disparus.
Mais j’ai aussi aimé sa leçon de peinture. Ainsi déclare-t-il que « chaque tableau se trouve coupé de sa propre finalité car il n’est que l’élément d’un processus qui le dépasse. (…) N’est que la mélancolie d’une Unité perdue. (p.307) »
Monet qui s’émancipe de 4 siècles de perspective linéaire donnant l’illusion de la profondeur (p.326).
Bref, Claude Monet invente une nouvelle façon de peindre au-delà de l’impressionnisme.
J’ai aimé que la notion d’écart, de distance avec la réalité tende tout le roman : « Monet disait peindre l’espace qui le séparait de l’arbre et non l’arbre lui-même » (p.237).
Un bémol : le détour par la zone d’intérêt des camps de concentration juste au milieu du livre qui m’a paru un peu factice.
Je ne vous dévoilerait bien sûr pas le fin mot de cette recherche sur les Grands Panneaux et pourquoi ils provoquent un sentiment de malaise chez le narrateur. Je vous laisse le plaisir de découvrir cette enquête.
L’image que je retiendrai :
Celle des deux salles du musée de l’Orangerie dont la forme a été voulue par le peintre, et qui dessinent une paire de lunettes, entre autre.
Bernanos, Zweig, Brésil
Par quoi commencer ?
J’ai aimé que ce récit me parle de Georges Bernanos, son exil au Brésil avec toute sa famille au début de la Guerre, lui qui avait fait la Première et a voulu mettre sa famille à l’abri.
J’ai aimé retrouver Stéphane Zweig, fuyant avec sa seconde femme les persécutions nazies.
J’ai découvert avec horreur que le mouvement nazifasciste avait également pris racine dans ce pays aux antipodes, mettant les nerfs du Grantécrivain à rude épreuve.
J’ai découvert que tous les deux s’étaient installé dans le Minas Gerais, là où s’est inventé le Brésil contemporain (p.85)
Bien sûr, l’écrivain français ne pouvait que s’installer dans une ferme à la Croix-des-âmes.
J’ai découvert que l’aventure brésilienne de Claude Lévi-Strauss avait correspondu avec celle des deux exilés, inspirant Tristes Tropiques. Deux visions d’un même pays : un futur possible pour les romanciers, le crime fondateur de la destruction des peuples indigènes pour l’anthropologue (p.173)
J’ai découvert Lotte (Charlotte), la seconde femme du Grantécrivain, qui organise les voyages, tape inlassablement à la machine les textes de son mari, traduit dans d’autres langues européennes ses romans.
Zweig conseillait de reconstituer « l’univers d’une époque » pour comprendre un homme (p.299)
J’ai apprécié les images qui parsèment le récit, sauf la dernière, celle des corps de Stephane et Lotte sur leur lit de mort.
Sébastien Lapaque évoque l’hypothèse que Zweig ne se soit pas suicidé mais ait été tué par les nazifascistes brésiliens ; mais surtout précise que Lotte a rejoint son mari dans la mort quelques heures plus tard en chemise de nuit alors que Stephane était en costume.
Mon bémol : j’ai été déçu par le dialogue imaginé par Sébastien Lapaque entre Bernanos et Zweig (dialogue qui a vraiment eu lieu mais sans témoin). Les deux écrivains y parlent politique, mais très peu théologie.
Et Sébastien Lapaque de souligner qu’il n’a pas imaginé le dialogue entre Lotte et Jeanne Bernanos. Dommage que les femmes aient été mise de côté.
Mais ce récit m’en a appris beaucoup sur l’histoire politique du Brésil entre 1939 et 1945.
L’image que je retiendrai :
Celle de Georges Bernanos se tenant sur deux cannes suite à son accident de moto, debout pendant la scène, et Stephane Zweig assis, la tête dans les mains.
famille, Japon
Quel plaisir de retrouver la plume si douce d’Antoine Choplin.
Ce roman nous emmène au Japon, en bord de mer, à la rencontre de Masao, ouvrier dans une usine.
J’ai aimé découvrir peu à peu son passé : sa fille Harumi, la disparition tragique de sa femme et le traumatisme pour Masao.
J’ai aimé sa rencontre avec le gardien du port, leur confiance mutuelle.
J’ai aimé que Harumi construise un musée dans la ville où habite Masao, qu’elle emmène son père visiter une exposition et que son père tombe sous le charme de l’installation bleue, qu’il soit transporté par elle.
J’ai aimé cette idée de construction de barque : comme si avec elle, Masao avait voulu sauver sa femme à postériori. Et j’ai aimé que sa fille construise des musées pour des constructions.
J’ai aimé les constructions artistiques de la mère de Harumi : kimono-fantôme surtout.
Un roman sur le besoin de faire quelque chose de beau de ses mains pour sortir du chagrin.
L’image que je retiendrai :
Celle de la barque colorée de Masao.
enlèvement
Le titre entier de ce roman est : Ilaria ou la conquête de la désobéissance. Mais la jeune Ilaria ne désobéit jamais dans ses pages. Elle se rebelle un peu, soit, mais ne désobéit jamais.
Elle ne peut pas, elle a trop peur des colères brusques de son père, qui en plus boit.
Nous suivons donc Ilaria, 8 ans au début du roman, enlevé à Genève par son père qui part en Italie avec elle. Commence alors de longs mois d’errance sur les routes puis la recherche d’argent avec des petites combines. L’occasion pour le lecteur de revoir sa géographie du pays.
J’ai eu de la peine pour cette petite fille qui ne comprend pas grand chose à ce qu’il se passe, avec un père menteur et affabulateur.
Une petite fille déscolarisé, évidemment, qui entend les nouvelles du pays à la radio : attentats, enlèvements.
Nous avons également les télégrammes que le père envoie pour saisir les raisons de son acte fou.
J’ai été étonnée que, lorsqu’elle peut enfin appeler sa mère, celle-ci ne réponde pas. Et j’ai trouvé extrêmement difficile le choix qu’on lui donne en fin de roman.
J’ai aimé qu’Ilaria trouve parfois un peu de joie auprès de certains adultes plus attentifs à son bien-être.
L’image que je retiendrai :
Celle de l’ours Birillo qui la suit partout et dans lequel elle cache ses trésors.